ME – JE

Faire somme de constats et s’interroger en particulier sur une course du monde pour laquelle il apparait difficile d’y pouvoir quoi que ce soit. Pourquoi ce train ne comprend il pas tout ce que je souhaite lui vouloir de bien ?

Le train file, partagé entre des vapeurs d’avant, mu de sensibilités d’un monde qui depuis argue in limine litis, en la charnière branlante d’un entre-deux, s’entête à pas perdu au propylée du grand procès des excès pétroliers, sans qu’il ne daigne jamais s’audiencer. La remise en jeu d’alors qui n’a pas su rappeler que, le choix demeure nôtre, est d’actualité à nouveau. Oser changer, ou privilégier une cécité passive au bénéfice d’un dénouement ultime ? Rien n’est véritablement énoncé ni décidé.

Je crois en la valeur de la terre, dans ce qu’elle exprime d’essentiel, de nourricier. Je veux croire en ma joie, toute attristée de ne se considérer entière que sous le couperet Guillotin de ne savoir être en même temps partagée, empathique, universelle.

Comment, à lire un aveuglement à n’être qu’au travers de vérités que l’on nous offre, vais-je vassal, parvenir à convaincre d’une nécessité à devoir changer ? Le puis-je seulement ? Une félicité tâtonne et s’étonne. S’étalonnerait-elle à l’aune d’assertion chiffrée, consumériste, où la simple essence qu’est celle de partager un espace organique, ne résonne plus ?

Que suis-je, errant sur un monde qui ne se comprend plus qu’à travers l’outrance de comptes en banque vomis à la face de ceux qui doivent s’y comparer ? Assommé d’écho déraisonnable, d’égo irréfragable, désireux d’exister plus, toujours, encore, que l’autre surtout. Ce mariage fou dont la dote est sans borne, inlassablement reconduite, ressassée sans cesse, nous jette vers une inexorable faim, trop riche seulement de sa solution ultime, finale, et pour celui que j’imagine mais ne veux pas savoir ; la fin, la vraie sans pain.

Je bade incrédule sur les contours vagues d’une sorte d’Armageddon, « d’America first » d’un suicide collectif que personne ne pense habiter, où témoin lucide je déambule et contemple amer ce que je ne voulais pas. Une main volée qu’une liesse collective hardie, emportée d’une appétence vive, si tant qu’un plein d’émotions m’engorge d’une tristesse soudaine, m’invite à toiser une capacité sourde à vaillamment s’en aller périr. Les voici sourdrent les tous en cause, mélancolie, abandon, hurlement et terrorisme, syndrome de glissement, conviés à l’agape, des espérés cris égarés sombrement devenus renonciations subies. Tout invite à célébrer la vie, pourtant l’ensemble s’efforce à l’éteindre pour, pire, mieux la regretter ensuite. Chacun irrationnel sans certitude sur rien sans remet-il à la grande loterie, supputant idoine qu’il n’y aura pas d’hydre ni Léviathan ? Gageant alors qu’ainsi faisant, serein et sans urgence, le « tout n’est pas si terrible » enjoindra l’autre tout enclin sur mon bon conseil à faire d’abord.

Un monde de « il faut » plus que de « faisons » sans doute et sans suite. Cela fut toujours. Courir plus vite, plus longtemps, lancer plus loin, chasser plus évidemment, sauter plus haut. Jusqu’où falloir tout cela ? Sur la lune, et entacher ma féérie d’enfant d’une empreinte, d’un grand pas ensuite. Je pu toutefois redorer un sourire de lune, si clair qu’il sut luire, illuminer les auras hyalines de premières étoiles et déjà préférer ô combien le suave vert nuit vanillé pralin et l’attraction bien plus que la pesanteur. … … Le temps doux coule et aujourd’hui que puis-je sinon, partager nombre de ce que n’osais dire faute de trop d’ire peut-être. A qui, comment, pourquoi ? Etre cartésien, comment, selon Quintilianus ne pas parvenir à s’ouvrir un horizon où 8.10 9 sont pléthoriques, surement beaucoup, vraiment trop ? Qu’à toujours vouloir exister plus dans des dimensions qui ne nous les autorisent pas, soyons certains qu’il n’y aura pas de téléportation ni de monsieur Spok, pas même de bodybuildés volants, de Capitaine Marvel, enfin, surement pas pour tous et qu’à échéance de 50 ans il ne pourrait se rencontrer que souffrance et un benoît vide hébété de l’avoir avec vacuité toujours sondé, fouillé et quand même creusé. Perforer, oblitérer, excaver, déterrer, faire du trou toujours et encore du trou, serait-il un secret à exhumer un savoir oublié, ou plus loin inconnu, qu’il nous faut à grande hâte connaître pour … ? Mieux disparaître puisque de cela nous ne doutons plus toute échelle confondue. C’est d’ailleurs, parfois, une autre de nos qualités que de se mettre des barreaux, plus rarement à celui des bonnes causes, aspirant vainement à tenter de s’y rattraper ensuite.

Je vais être plus fort, c’est décidé, sans assurance aucune que cela soit possible, je vais le dire, l’écrire, en silence le vivre, le démontrer taiseux, ou plutôt croire en la construction en mode hellénique, respectueux d’observer ce qui entoure, avec la retenue de celui qui connait sa contenance et qui prudent sait jauger et oncques ne s’en remet aux débordements de sa pensée. La célérité est propre à toute chose et différente chaque fois. Savoir cela détermine l’immensité néfaste de l’emballement. Je suis le moteur sans frein, le skieur sans chasse neige, la bride abattue, la molécule, l’atome … La réaction ? Voilà vouloir faire vite, puis réussir tout de suite et enfin s’imaginer plus que l’on est, tous unis délétères. C’est ainsi bien démuni que je considère l’immensité du « à faire », l’innombrable des angles d’attaque et le peu qu’il me reste avec pour autant l’acuité de le dessiner posément. J’oublie d’être passéiste et que j’aurais pu faire autrement. Heureux acète appliqué que trop peu doué, je goute l’effort savoure son confort. Dans une obligation de moyens, je relativise déjà le résultat et la bonne place à lui donner.

Quelle est la motivation du plus exponentiel, désirer toujours et encore, sans but ni bon sens, toujours en trêve de demander ce que cela sert. La pensée des anciens a de cela de formidable lorsque, plus que d’aller vite, elle propose des limites à notre espace, sa finitude, laquelle dédouane qui s’interroge, sacrifie tout à la perspective de desseins inachevés. Il serait possible d’y repérer une inutilité. Une autre lecture y projette une richesse de vie, de celle qui, e.g. me guide à chaque coupe pour investir sincérité, peur et envie de réussir, cela à hauteur de ce que je suis capable de m’en représenter et de chercher. J’aime cette humilité, de celle qui pose en équité avec tout alentour, sans prétendre, simplement heureux de participer, respectueux et dérangé chaque fois.

Me viennent à l’esprit le Sisyphe de Camus, la prépondérance de la quête en toute situation, d’un tout que je m’accapare au titre d’un moment dérobé, petit bonheur erratique qu’à ce paragraphe je relativise et hisse à celui de droit égoïste, sans lequel je me déliterais « auto-phagocyté » à un noir pavillon kafkaïen par le jeu chassé-croisé de mon propre opprobre d’avoir et de ne pas avoir ensemble fait simultanément, été, comme parfois consommé de doutes.

Or donc, du fait de ce « fait » quelle position adoptée, de sorte qu’elle soit utile, si tant est que ma conviction satisfasse à la livrer juste, altruiste acceptable au filtre des trois tamis et lui accorder selon un prisme, toujours mien, une respectable légitimité. Se pose la question induite du positionnement, celle d’agir ou non, celle de l’exigence de l’implication, celle de la qualité pour intervenir. Se pose la question des questions, des bonnes et des moins bonnes. A trop épouser la doxa le risque s’insinue grand de s’effacer trop et je tiens à m’en absolument bien garder.

Pour aller plus loin se lier à l’agora, décider de vivre au travers d’une lecture sociale à l’instar de celle qui observe un dynamique engagement pour servir la cause commune. Être utile. A la lueur de quel filtre m’éclairer alors ? Celui policé de ma certitude et ma toute généreuse volonté d’être « l’homme par nature animal politique », ou devrait-il être celui, convenu, du groupe habile à me guider au cœur d’une collaboration préservatrice d’elle-même ?

Le ton était donné du constat à l’interrogation. Bien maladroitement, sans formuler une bonne réponse plutôt qu’une autre, au sein de problématiques devenues évidentes le sujet d’un devenir demeure. A embrasser le temps des choses on s’écrit manifestement chaque jour une voie. A la badinerie épistolaire s’offre une interrogation majeure, celle que la crainte de ne pouvoir se prolonger, semble obliger à sans cesse devoir tout dépasser.

ME