Gildas Chéné – Bruissement et mouvement

Bruissement

Tous les discours et toutes les expertises obscurcissent mon esprit. Toujours plus d’experts pour avoir toujours plus de discours.

Je me sens comme Dôgen. S’assoir à contempler un bout de nature, voir dans son cœur comme elle est belle, voici ce à quoi j’aspire. Cueillir un fruit quand le besoin s’en fait sentir. Sourire à ceux qui partagent ce moment. Profiter d’un rayon de soleil. Profiter d’une averse.

Mais voilà : il y a que je vis dans une agglomération de 800 000 habitants, dans un pays qui en compte 67 millions, sur une terre colonisée par 7 milliards d’individus. À quoi aspirent-ils tous ces un-dividus ? S’assoir à contempler un bout de nature ? Peut-être…

Sauf que chacun veut donner son avis sur la façon de s’assoir, le meilleur moyen de contempler un pauvre bout de nature qui n’en demande pas tant. Et c’est reparti pour les discours des experts sur la façon de contempler la nature en position assise.

Tant de bruit ! Tant de bruit !

Mais si je vous disais que je suis las de ce vacarme, vous pourriez croire que je suis mort à l’heure où vous lisez ces lignes.

Or j’aime la vie. Elle fait aussi des jolis bruits, non ?

Je bouge-t-il ?

Curieusement, rester enfermé m’a permis de prendre de la distance.

C’est peut-être cela qu’on appelle le voyage immobile…

Toujours est-il que les injonctions à être efficace et optimisé ont pris un drôle de visage.

N’ai-je pas perdu beaucoup de temps à essayer d’en gagner ?

Comme on dépense sa vie à essayer de la gagner ?

On se bat tellement pour avoir la paix que cette guerre semble perdue d’avance.

Déposer les armes ? Cela signifie-t-il que…

Gildas Chéné